Monday 5 May 2008

Verra-t-on Omertà à nouveau au Québec?

Comme certains d'entre vous le savent, je suis un grand fan de séries policières, et d'une en particulier qui a transformé radicalement la télévision au Québec: Omertà: La Loi du Silence, écrite par Luc Dionne et réalisée (pour les deux premiers volets) par Pierre Houle.

Petit retour nostalgique aux années 90... À l'époque, la télé québécoise carburait aux téléromans et aux téléséries plus lourdes signées Réjean Tremblay (ou l'un de ses imitateurs), qui étaient en fait des soaps à gros budgets, situés dand des milieux professionnels précis: le hockey (Lance et Compte) ou le journalisme (Scoop). C'était écrit avec un très gros stylo, les intrigues mélangeaient situations invraisemblables et intrigues sexuelles gratuites (Réjean Tremblay n'a jamais eu de talent pour l'écriture, alors il compensait en cherchant à mettre à nu toutes les actrices un peu jolies du Québec). Il y avait aussi des séries historiques qui se passaient la plupart du temps au XIXe siècle au Québec, qui étaient parfois excellentes (Les Filles de Caleb ont fait histoire), souvent médiocres (Les Filles de Caleb ont fait hélas beaucoup de clones). Puis, autour de 1995-1996, apparurent une grappe de séries situées dans le milieu policier: Jasmine (à TVA), 10-07 (à TQS) et enfin Omertà (à Radio-Canada). Jasmine était un clone de la formule Réjean Tremblay: l'histoire d'une policière métisse à Montréal, confrontée au racisme de ses collègues et la méfiance de sa communauté, avec beaucoup de temps passé dans le vestiaire des policières. 10-07 était une banale histoire de tueur en séries comme on pouvait en voir partout ailleurs. Puis, en janvier 1996, vint Omertà. Au départ, on aurait pu croire à une autre imitation de la formule Tremblay: milieu professionnel précis (la police), triangles amoureux, etc. Mais Omertà s'est avérée, pour moi et beaucoup de téléspectateurs, une épiphanie télévisuelle. L'histoire évoluait autour de l'Escouade du crime organisé de la SN (la Sûreté Nationale, en fait la SQ rebaptisée), qui essayait de capturer Giuseppe Scarfo, le chef de la maffia montréalaise. Deux policiers partageaient la vedette de la série: Pierre Gauthier, l'enquêteur principal, et François Pelletier, agent-double. Pour compliquer les choses, la nouvelle flamme de Gauthier s'avérait être la fille de Scarfo et Pelletier tentait de protéger son ex, ancienne policière devenue héroïnomane et prostituée, tout en essayant de garder sa couverture. Bien que l'intrigue avait quelques invraisemblances, elle parvenait à garder un semblant de plausibilité, notamment à cause de l'authenticité du travail des policiers, décrit avec minutie et réalisme. Omertà a amené beaucoup à la télé québécoise: une violence assumée (les protagonistes n'étaient pas des anges), un Montréal authentique, une musique jazzée, signée Michel Cusson, qui donnait le ton et créait une atmosphère incomparable, une distribution qui mélangeait visages connus (Michel Côté, Germain Houde, Michel Dumont, Claude Blanchard, Micheline Lanctôt) et inconnus (Luc Picard, Brigitte Paquette, Dino Tavarone), une intrigue qui nous amenait de façon plausible aux milieux de la haute finance aux coins glauques de Montréal, remplis de junkies et de prostituées, une description du crime organisé à saveur québécoise. Omertà était sombre, brut, familier dans son décor mais dépaysant dans son exécution et ses protagonistes.


Tout ça pour vous dire que j'ai été enthousiasmé d'apprendre que Dionne travaillait sur une quatrième série, mais dépité par de savoir que son développement était bloqué pour cause de problèmes de droits. J'espère que ça va se régler. Parce que j'en veux plus, parce que la télé au Québec en a besoin.

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For the English-speakers among you (probably the biggest part of my readership), I will write an entry about the same topic, because it is worth it.

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